Le vin aux noces de Cana
Cana, témoin des deux premiers miracles de Jésus en Galilée, n’est plus qu’un village d’un millier d’habitants agréablement assis au flanc d’une colline. La chapelle qui perpétue le souvenir du premier miracle occupe le site d’une église du temps des croisés, bâtie elle-même sur l’emplacement d’un édifice du IVème siècle. La tradition est donc solide et le village actuel de Kefr-Kenna garde ses droits à représenter la Cana évangélique, malgré les raisons allégués au siècle dernier en faveur d’une ruine située à trois heures de marche au nord de Nazareth[1].
On suppose que Jésus et ses nouveaux disciples n’arrivèrent pas à Cana tout à fait au début des fêtes. Marie s’y trouvait déjà, soit comme amie ou parente de l’un des époux, soit comme une auxiliaire utile, dont on appréciait les services et les conseils. Sa façon d’agir dans la suite semble montrer qu’elle avait quelque part à l’ordonnance du festin.
Aux pharisiens de leur temps, qui se scandalisaient de voir le Sauveur et sa mère assis à un repas de noces, les Peres de l’Eglise répondaient que Jésus, parfait modèle de la vie commune, comme Jean l’avait été de la vie pénitente, avait voulu autoriser par son exemple l’usage modéré des plaisirs honnêtes et honorer la célébration du mariage, qu’il se proposait d’élever à la dignité de sacrement. D’ailleurs sa seule présence imposait à tous la décence et la retenue.
Maintenant rentrons dans la profondeur du signe de Cana et ce qu’il nous dit aujourd’hui. A Cana, la noce a failli être gâchée : on n’a pas prévu assez de vin et c’est la catastrophe. Marie s’en est aperçue. Elle ne va pas alerter le maître du repas mais Jésus. Puis elle s’adresse aux serviteurs : « Faites tout ce qu’il vous dira».
Le « manque de vin » à Cana est symbole pour notre monde d’aujourd’hui, il évoque d’autres manques bien plus graves: nous pouvons les découvrir à travers la signification du vin dans la Bible.
-Il est associé à l’amour. Le Cantique des cantiques se sert de l’image du vin pour évoquer l’amour et la jouissance (Ct 5,1).
-Le vin est le signe de la joie. «Alors, mange ton pain avec plaisir et bois ton vin d'un cœur joyeux, car Dieu a déjà approuvé tes actions». (Qo 9,7)
-Le vin est même le symbole de la vie pour qui en boit avec modération. (Eccl 31, 27).
-Il est aussi le symbole de la bénédiction de Dieu (Gn 27,28). Le vin est même utilisé pour symboliser l’alliance entre Dieu et son peuple. Pour nous la grâce et l’amitié de Dieu.
Aujourd’hui manque le vrai amour, la vrai charité… il existe plutôt une déformation de l’amour, des caricatures de l’amour (l’égoïsme, la sexualité déformée, la prostitution, la pornographie, etc.)… aujourd’hui les gens malheureusement ne vivent plus dans la vrai joie intérieure qui donne envie de vivre la vie en plénitude (l’extrême pauvreté, les crises économiques, le stress, la terreur, la peur, etc.). Aujourd’hui la vie, elle-même est en danger pour les bébés avec l’avortement, pour les enfants et les jeunes par la perte des valeurs chrétiennes et des points de repères à cause des nouvelles idéologies, des nouvelles addictions, et pour les adultes et les anciens, l’abandon, l’euthanasie, etc. Aujourd’hui manque dans beaucoup des cœurs la grâce de Dieu et cela à cause du péché, à cause du démon qui cherche à nous éloigner de notre Dieu et Seigneur…
Personne ne peut être indiffèrent à tout cela. Chaque jour, les médias nous décrivent des situations douloureuses, des victimes du terrorisme, des refugiés qui meurent de froid, des malades que personne ne visite, des conflits à l’intérieur des familles… Mais, et ça est extrêmement consolateur, notre Sainte Mère la vierge Marie voit tout cela et elle intervienne, elle le dit à son fils Jésus : Ils n’ont plus d’amour. Ils n’ont plus de joie. Ils n’ont plus de paix, ils détruisent leur vies, ils n’ont pas la grâce de Dieu…
Tous ces problèmes sont constatés par Marie qui voit tout cela et elle continue à nous dire : « Faites tout ce qu’il vous dira». Ce que Jésus nous dit et que nous avons à faire, nous le trouvons dans les évangiles. Nous sommes invités à nous en imprégner et à nous laisser transformer par lui.
En ce dimanche, prenons le temps d’entendre l’appel de Marie qui nous est sans cesse renouvelé. Elle nous renvoie au Christ et à l’évangile. Elle intercède pour nous et pour l’humanité tout entière. C'est à Elle que nous confions nos préoccupations, les nécessités et les situations difficiles de nos vies. Cette bonté prête à aider de la Mère, à laquelle nous nous confions, c'est ici, dans l'Ecriture Sainte, que nous la voyons pour la première fois. Toutes ces souffrances qui accablent tant d’hommes, de femmes et d’enfants, elle nous invite à les voir, mais aussi elle nous invite à nous en remettre à Celui qui est l’amour, la joie, la paix, la source de la vie et qui nous donne la profonde amitié avec Dieu. La bonne nouvelle de ce dimanche est pleine d’espérance : c’est le Christ qui a le pouvoir de tout changer en nous. Il désire que nous retrouvions la joie et que nous soyons dans le monde les témoins de cette espérance qui nous anime.
P. Silvio Moreno, IVE
[1] Voir l’explication archéologique du Ferdinand Prat, SJ, Jésus-Christ, sa vie, sa doctrine, son œuvre, Paris, 1933, p. 180.