Le problème de la communication digitale
Présentation du livre « Seuls ensemble » et de la conférence "Connectés, mais seuls ?"
de la Docteure Sherry Turkle
P. Silvio Moreno, IVE
Vu l’importance de parler, aujourd’hui, de la problématique des nouvelles communications et leur danger pour l’homme contemporain, je voudrais vous présenter un livre accompagné d’une conférence qui, malgré ses limites, peut cependant nous aider à comprendre la situation dans laquelle nous vivons.
Deux conférences m’ont conduit à la connaissance de cette auteure et de son livre. L’une du P. Miguel Fuentes, prêtre de notre congrégation, qui parlant des différents types d’addiction dont celle de la télécommunication digitale, cite et conseille de lire le dernier livre de la docteure Sherry et d’écouter sa conférence sur le sujet. Cela m’a beaucoup intéressé vu le contact que j’ai dans ma paroisse avec beaucoup de jeunes qui subissent la même problématique. Malheureusement je ne suis pas réussi à obtenir le livre, mais j’ai pu, par contre, écouter sa conférence qui est en anglais mais sous-titrée en français. Or, dans cette conférence appelée « Connectés, mais seuls ? » qui ne dure que 20 minutes, la docteure Sherry explique le contenu de son livre « Seuls ensemble ».
Sherry Turkle, née le 18 juin 1948 à New York, est professeur d'études sociales en science et technologie au Massachusetts Institute of Technology. Elle a obtenu un BA en études sociales, puis un Ph.D. en sociologie à l'université Harvard.
Même si, malheureusement, ses recherches sont essentiellement axées sur la psychanalyse de Freud, elle a cependant la valeur de l’étude sur les interactions entre l'être humain et les objets technologiques, et particulièrement entre les hommes et les objets informatiques (ordinateurs, jouets électroniques, robots, téléphone, internet, etc...).
Elle est l’auteur de l’ouvrage The Second Self: Computers and the Human Spirit paru en 1984. Il a été traduit en français sous le titre Les enfants de l’ordinateur; et de Life on the Screen: Identity in the Age of the Internet. En 1996 elle écrit un autre livre sous le titre « Sexe, lies, avatars ». Dans cet ouvrage elle se vantait de la nouvelle technologie communicative, célébrait la vie sur internet et y mettait tout son espoir. Mais, 15 ans après cet ouvrage, elle va écrire son essai appelé de façon suggestive « Alone Together » (Seuls ensemble. De plus en plus de technologies et de moins en moins de relations humaines) paru en 2011. En voici un résumé trouvé sur différents sites internet qui promotionnent le livre, confirmé d’ailleurs par ce qu’elle-même dit dans sa conférence:
- Seuls ensemble s’intéresse à l’impact des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) sur les comportements. La réflexion proposée par Turkle apparaît essentielle. Elle ouvre un débat sur les implications sociales, voire morales, de nos choix technologiques.
- Seuls ensemble offre un récit vivant sur ces questions alimenté aussi bien par des enquêtes de terrain que par l’expérience personnelle de l’auteure. L’histoire de Turkle peut se lire comme celle d’une déception par rapport aux espoirs qu’elle avait pu placer dans la technologie lors de ses débuts comme psychologue scrutant les rapports homme/machine dans les années 1980. Sherry Turkle dissèque l’ambivalence de la technologie quand elle propose d'être « l’architecte de notre intimité ». Seuls ensemble est un portrait de notre relation changeante avec la technologie et de comment celle-ci a redéfini notre perception de l'intimité et de la solitude.
-Seuls ensemble décrit ce que Sherry nomme des «robots sociaux». A partir d’enquêtes menées avec des enfants et des personnes âgées, elle remarque que ces derniers sont désormais prêts à concevoir que ces robots sociaux puissent avoir des émotions, une forme de conscience ou, pour le dire autrement, qu’ils soient en vie. Ces perceptions s’expliquent partiellement par la fragilité des sujets étudiés qui s’avèrent bien souvent manquer d’écoute ou d’affection de la part de leurs proches: les robots sociaux viennent alors combler un vide. Ils remportent ainsi une adhésion croissante non pas grâce à leurs qualités intrinsèques mais plutôt à cause des défaillances des êtres humains. «La technologie, dit-elle, nous charme lorsque ce qu’elle a à nous offrir parle à notre fragilité humaine».
-Seuls ensemble décrit finalement, les transformations des relations induites par la montée en puissance d’objets et d’applications numériques du quotidien tels que les smartphones, les réseaux sociaux et les mondes virtuels. Les nouvelles générations sont particulièrement touchées aussi bien en termes d’attention que d'affection. Dans le discours de la connexion permanente, Turkle décrit une réalité où les individus en viennent à préférer la sécurité d’une discussion par chat ou SMS à un tête-à-tête physique, c’est-à-dire un remplacement de la réalité : «Manquant de confiance en nos relations, désirant l’intimité tout en la craignant, nous comptons sur la technologie pour nous permettre à la fois d’entretenir des relations et nous protéger de leurs dangers, comme par exemple lorsque nous répondons à un déluge de textos ou interagissons avec un robot».
Parmi les causes que la docteure dénonce il faut signaler le fait de se cacher, d’avoir peur de l’autre et le problème que la personne a pour communiquer avec les autres. Turkle conclue avec une nécessaire réaction de notre part: «Il ne s’agit pas forcément de rejeter la technologie en bloc, mais de la façonner pour qu’elle respecte ce qui nous est cher».
Je termine avec une petite réflexion. Il n’est pas de grande œuvre humaine, ni de vie spirituelle authentique, sans qu’on ne prenne le temps de la réflexion, de la solitude, du silence intérieur et extérieur. Notre mode de vie moderne et agitée, laisse très peu de place au silence. La plupart de nos contemporains sont effrayés par le silence, ils ont peur de se retrouver face à eux-mêmes et ainsi n’ont aucune espèce de vie intérieure, vivant à la surface d’eux-mêmes et ne recherchant jour après jour que les plaisirs d’une vie superficielle. Combien d’adolescents, comme bien l’a montré la docteure Turkle, avouent qu’ils ne supportent pas le silence, qu’ils ont besoin de musique, d’internet, du constant téléphone afin d’être communiqué. Par contre, le silence est un vide nécessaire que « Dieu » va pouvoir remplir de sa présence. C’est là le but du silence : faire une place à Dieu, se taire pour se mettre à son écoute. Le silence permet la maîtrise de soi, de son corps, de ses pensées, il permet d’écarter toute idée étrangère pour se fixer en Dieu.
Jeunes n’ayez jamais peur de vous deconecter et du silence !
Pour écouter la conférence de Sherry Turkle aller sur :