CORRECTION FRATERNELLE

CORRECTION FRATERNELLE

La « correction fraternelle » un véritable acte de charité.

Chers frères, trop souvent, nous entendons l'amour de manière simplement affective et sensible. Mais Jésus va nous proposer une nouvelle considération de l’amour. Ce n’est pas facile. Nous avons peur de nous tromper, de blesser. Et nous sommes assez malins pour trouver toutes les prétextes qui nous permettront d’éviter une telle confrontation. Mais ça, c’est tout à fait contraire à l’évangile. Aimer, va nous dire Jésus, c’est considérer l’autre notre « frère » et donc « responsable » de lui et l’aider à avancer sur le chemin de la sainteté.

Pour cela il faut dire que la « correction fraternelle » dont parle Jésus, et donc le fait d’aider l’autre à éviter le péché, est un véritable acte de charité. Pourquoi ? La raison en est que nous sommes tenus par le commandent du Seigneur « aimez vous les uns les autres » à l’amour du prochain. Or l’amour inclut en soi d’une part que l’homme veuille du bien à celui qu’il aime. C’est cela aimer quelqu’un : lui vouloir du bien. D’autre part il convient aussi à l’amour que nous voulions qu’il n’y ait pas de mal chez ceux que nous aimons. Mais la volonté n’est ni efficace, ni véritable, si elle n’est pas confirmée par l’action ; c’est pourquoi il ne convient pas seulement « vouloir », mais « faire » du bien à nos amis et « faire » quelque chose pour empêcher leurs maux.

Or, le bien de l’homme est triple, et triple le mal qui lui est opposé :

Il y a, en effet, un certain bien de l’homme qui consiste dans ce qui lui est extérieur, matériels, ce qui est le plus petit bien; et en ce bien, l’homme est tenu de subvenir à son prochain par la générosité d’une aumône concrète. En effet, il est dit en 1 Jn 2, 18 : Celui qui aura les biens de ce monde et qui aura vu son frère dans la nécessité et qui lui aura fermé ses entrailles, comment l’amour de Dieu demeure-t-il en lui ? Et à raison égale, l’homme est tenu de porter secours à son prochain en cas de perte des biens temporels.

Un autre bien de l’homme est celui de son corps ; en quoi aussi, l’homme doit prêter assistance physiquement à un homme et lui prêter secours contre un mal contraire.

Le troisième bien est celui de la grâce, de l’amitié avec Dieu qui est le bien de l’âme, à qui s’oppose le mal du péché. Donc, pour atteindre ce bien ou éviter le mal, le chrétien est d’autant plus tenu par la « charité » d’aider son prochain. « C'est pourquoi un chrétien doit aider à un ami pour éviter le péché plus que pour éviter la perte d’un bien matériel. Et c’est pourquoi l’homme est tenu, par la charité elle-même, de porter secours à son prochain pour avoir la grâce de Dieu, en lui donnant conseil pour bien agir, et en le corrigeant, afin qu’il évite le péché.

Les bienfaits de la pratique de la correction fraternelle sont nombreux, aussi bien pour celui qui en est l’objet que pour celui qui la pratique. Comme elle est un acte concret de la charité chrétienne elle jouit des fruits de cette vertu : la joie, la paix, la miséricorde. Elle demande l’exercice de beaucoup de vertus : la charité, l’humilité, la prudence. Elle améliore la formation humaine des personnes qui deviennent plus courtoises. Elle rend la relation mutuelle entre les personnes plus surnaturelle et plus agréable, humainement parlant. Elle canalise l’éventuel esprit critique négatif qui pousse à juger avec un sens peu chrétien le comportement des autres. Elle empêche la médisance ou les plaisanteries de mauvais goût sur des comportements ou des attitudes de notre prochain. Elle renforce l’unité de l’Église et de ses institutions à tous les niveaux et contribue à une plus forte cohésion et à une plus grande efficacité de la mission évangélisatrice. Elle garantit la fidélité à l’esprit du Christ. Elle permet aux chrétiens d’avoir la ferme assurance de ne jamais manquer de l’aide de leurs frères dans la foi.

Saint Ambroise est un témoin de la pratique de la correction fraternelle lorsqu’il écrit au IVème siècle : « Si tu découvres un défaut chez ton ami, corrige-le en secret [...]. Les corrections, en effet, font du bien et sont plus profitables qu’une amitié muette. Si ton ami en est offensé, corrige-le quand même : n’aie pas peur d’insister même si le goût amer de la correction ne lui fait pas plaisir. Il est écrit dans le livre des Proverbes que les blessures que fait un ami son plus supportables que les baisers des adulateurs (Pr 27, 6)[1]. Saint Augustin note aussi combien il serait grave de priver le prochain de cette aide : « Tu es pire en te taisant que lui en fautant »[2].

Chers frères, Jésus le redit avec force : je suis responsable de mes frères. Alors nous pouvons nous interroger cette semaine sur ce point. Est –ce que je laisse tomber les autres ? Est –ce que je me résigne à leurs malheurs, à leurs péchés ? Est –ce que je cherche positivement leur bien spirituel ?  

 

P. Silvio Moreno, IVE

 

[1] SAINT AMBROISE, De officiis ministrorum, III, 125-135.

[2] SAINT AUGUSTIN, Sermo, 82, 7.

 

 

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