La dévotion réparatrice des cinq premiers samedis[1]
enseignée à Sœur Lucie le 10 décembre 1925
Lors de son apparition à Fatima (au Portugal) le 13 juillet 1917, la Sainte Vierge avait annoncé : « Pour empêcher la guerre je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des Premiers Samedis ».
Le 10 décembre 1925, elle apparaît avec l’Enfant-Jésus à ses côtés à Sœur Lucie, au couvent des sœurs Dorothées de Pontevedra (en Espagne). Elle lui dit alors :
« Regarde, ma fille, mon cœur entouré d’épines que les hommes ingrats, à tout moment, lui enfoncent par des blasphèmes et des ingratitudes. Toi, du moins, cherche à me consoler et dis que je promets d’assister à l’heure de la mort, avec toutes les grâces nécessaires au salut, tous ceux qui, le Premier Samedi cinq mois de suite, se confesseront, recevront la Sainte communion, réciteront le chapelet et me tiendront compagnie pendant quinze minutes en méditant les 15 mystères du Rosaire avec l’intention de me faire réparation ».
Le 15 février 1926, l’Enfant-Jésus apparaît de nouveau à Sœur Lucie. Celle-ci lui expose la difficulté que plusieurs âmes ont de se confesser le samedi et demande que la confession dans les huit jours soit valide. Jésus lui répond alors : « Oui, elle peut remonter à beaucoup plus de jours encore, pourvu qu’en me recevant on soit en état de grâce et qu’on ait l’intention de réparer les offenses faites au Cœur Immaculé de Marie ». Lucie en parle aussitôt à la Mère Supérieure du couvent, puis se confesse au prêtre. Celui-ci lui demande de tout écrire et de garder le manuscrit, qui malheureusement a été brûlé en 1927.
Le 1 novembre 1927, Sœur Lucie écrivait à sa marraine, Dona Maria de Miranda : « Je ne sais pas si vous connaissez déjà la dévotion de réparation des cinq samedis au Cœur Immaculé de Marie. Comme elle est encore récente, j’aimerais vous inspirer de faire cette pratique, parce que c’est demandé par Notre chère Mère Divine, et Jésus a manifesté un désir qu’elle soit pratiquée. En plus, il me semble que vous seriez fortunée, chère marraine, pas seulement de la connaître et de donner à Jésus la consolation de la pratiquer, mais encore à la faire connaître et enlacer par beaucoup d’autres personnes. Elle consiste en cela : Pendant cinq mois au premier samedi, de recevoir Jésus dans la communion, de réciter un Rosaire, de garder compagnie avec Notre Dame pendant quinze minutes en méditant sur les mystères du Rosaire, et de faire une confession. La confession peut être faite quelques jours auparavant, et si dans cette confession précédente vous avez oublié l’intention (requise), l’intention suivante peut être offerte, pourvu qu’au premier samedi l’on reçoit la communion sacrée dans un état de grâce, avec l’intention de réparer des offenses contre la Vierge la Plus Sacrée et qui affligent Son Coeur Immaculé. Il me semble, ma chère marraine, que nous sommes fortunés d’être capables de donner à Notre chère Mère Divine cette preuve d’amour, parce que nous savons qu’Elle la désire. Quant à moi, j'avoue que je ne suis jamais si heureuse qu’à l’arrivée du premier samedi. N’est-il pas vrai que notre bonheur le plus grand, c’est d’appartenir entièrement à Jésus et Marie et de Les aimer uniquement, sans réserve ? Nous voyons cela si clairement dans les vies des saints ... Ils étaient heureux parce qu’ils aimaient, et nous, ma chère marraine, nous devons chercher d’aimer comme eux, pas simplement de sentir de la joie en pensant à Jésus, ce qui est le moins important - parce que si nous ne l’aimons pas ici-bas, nous l’aimerons en haut au ciel - mais de donner à Jésus et Marie la consolation pour être aimé ... et que dans cet échange d’amour Ils pourraient sauver beaucoup d’âmes».
Révélation à Tuy, le 29 mai 1930. Ce jour-là, sœur Lucie se trouvait à la Maison-Mère du couvent, à Tuy. Elle devait répondre par écrit à une série de questions posées par son confesseur au sujet de la dévotion réparatrice les cinq premiers samedis du mois. L’une d’entre-elles était : «Pourquoi cinq samedis et non neuf, ou sept, en l’honneur de Notre-Dame? ». Le soir, à la chapelle, Lucie faisait comme à l’accoutumé une heure sainte, de 23 heures à minuit, selon les demandes du Sacré-Cœur à Paray-le-Monial. Une présence divine lui révéla qu’il y a cinq espèces d’offenses et de blasphèmes proférés contre le Cœur Immaculé de Marie. Nous les présentons maintenant avec une petite explication des trois premières :
1. Blasphème contre l’Immaculée Conception. Voici quelques textes liturgiques qui nous aident à comprendre cette importante vérité :
- Genèse 3, 9-15.20 : Le récit de la chute originelle d’Adam et Eve désobéissant à Dieu.
- Psaume 98, 1 : Chantez au Seigneur un cantique nouveau car il a fait des merveilles.
- Ephésiens 1, 3-6.11-12 : Le plan divin du salut pour être immaculés.
- Luc 1, 26-38 : L’annonciation de l'archange Gabriel à la Vierge Marie.
2. Blasphème contre la Virginité de Marie. Principaux et brefs rappels doctrinaux sur la virginité perpétuelle :
a. « si quelqu’un ne confesse pas, selon les saints Pères, en un sens propre et véritable, mère de Dieu la sainte, toujours Vierge et Immaculée Marie, puisque c’est en un sens propre et véritable Dieu Verbe lui-même, engendré de Dieu le Père avant tous les siècles, qu’elle a, dans les derniers temps, conçu du Saint-Esprit sans semence et enfanté sans corruption, sa virginité demeurant inaltérable aussi après l’enfantement, qu’il soit condamné ». (Cf : Denzinger n. 503 - profession de foi du synode de Latran, le 31 octobre 649).
b. « de même en effet que la Vierge a gardé avant la conception la pudeur de la virginité, de même après la naissance elle n’a connu aucune atteinte à son intégrité ; car elle a conçu vierge, elle a enfanté vierge, et après la naissance elle a conservé la pudeur de l’incorruption sans qu’elle lui soit enlevée ». (cf : Denzinger n°571 - profession de foi du 16ème concile de Tolède, le 2 mai 693).
c. « lorsque nous scrutons, en recherchant avec une considération, les marques insurpassables des mérites grâce auxquels la Reine des cieux, la glorieuse Marie Mère de Dieu portée dans les hauteurs du ciel, resplendit parmi les astres comme l'étoile du matin..., nous jugeons qu’il est digne, ou plutôt qu’il est un devoir, d’inviter tous les fidèles du Christ pour le pardon et la rémission de leurs péchés, à rendre grâces et louanges au Dieu Tout-Puissant pour l’admirable conception de la Vierge Immaculée. Sa providence considérant de toute éternité l’humilité de cette Vierge, voulant réconcilier avec son créateur la nature humaine assujettie à la mort par la chute du premier homme, en a fait la demeure de son Fils unique en la préparant par le Saint-Esprit ; d’elle il a pu prendre la chair de notre condition mortelle pour racheter son peuple, cependant qu’elle demeurait vierge après son enfantement ». (cf : Denzinger n°1400 - constitution "cum Praeexcelsa" de sa sainteté le Pape Sixte IV - 27 février 1477).
d. « mais si la conception du Sauveur est au-dessus de toutes les lois de la nature, sa naissance ne l’est pas moins ; elle est divine et ce qui est absolument prodigieux, ce qui dépasse toute pensée et toute parole, c’est qu’il est né de sa mère qui est demeurée toujours vierge de même que plus tard il sortit de son tombeau, sans briser le sceau qui le tenait fermé, de même qu’il entra, les portes fermées, dans la maison où étaient ses disciples, de même encore - pour prendre nos comparaisons dans les phénomènes ordinaires - que les rayons du soleil traversent le verre sans le briser ni l’endommager, ainsi, mais d’une manière beaucoup plus merveilleuse, Jésus-Christ naquit de sa mère qui conserva le privilège de la virginité. Nous avons donc bien raison d’honorer Marie à la fois comme Mère et comme Vierge ». (cf : Catéchisme de Trente).
3. Blasphème contre sa Divine Maternité, avec en même temps le refus de la reconnaître comme Mère des hommes : Nous prions toujours : « Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs».
Saint Cyrille d’Alexandrie affirme extraordinairement : « Je m'étonne qu'il y ait des gens pour poser cette question : faut-il, ou ne faut-il pas appeler la Sainte Vierge Mère de Dieu ? Car si Notre-Seigneur Jésus-Christ est Dieu, comment la Vierge qui l'a mis au monde ne serait-elle pas la Mère de Dieu ? [...] L'Ecriture divinement inspirée déclare que le Verbe de Dieu s'est fait chair, c'est-à-dire s'est uni à une chair douée d'une âme raisonnable. A sa suite le grand et saint concile de Nicée enseigne que c'est le même Fils unique de Dieu, engendré de la substance du Père, par qui tout a été fait, en qui tout subsiste, qui pour nous autres hommes et pour notre salut est descendu des cieux, s'est incarné, s'est fait homme, a souffert, est ressuscité, et reviendra un jour comme juge... Et dès lors la Sainte Vierge peut être appelée à la fois Mère du Christ, et Mère de Dieu, car elle a mis au monde non point un homme comme nous, mais bien le Verbe du Père qui s'est incarné et s'est fait homme. Mais, dira-t-on : "La Vierge est-elle donc Mère de la divinité ?". A quoi nous répondons : Le Verbe vivant, subsistant, a été engendré de la substance même de Dieu le Père, il existe de toute éternité, conjointement avec celui qui l'a engendré, il est en lui, avec lui. Mais dans la suite des temps, il s'est fait chair, c'est-à-dire s'est uni une chair possédant une âme raisonnable, dès lors on peut dire qu'il est né de la femme, selon la chair. Ce mystère d'ailleurs a quelque analogie avec notre génération même. Sur la terre en effet les mères, d'après les lois mêmes de la nature, portent dans leur sein un fruit qui, obéissant aux mystérieuses énergies déposées par Dieu, évolue et finalement se développe en forme humaine ; mais c'est Dieu qui dans ce petit corps met une âme de la manière que lui seul connaît. "C'est Dieu qui façonne l'âme de l'homme", dit le prophète. Or, autre chose est la chair, autre chose est l'âme. Pourtant bien que les mères aient produit le corps seulement, on ne laisse pas de dire qu'elles ont mis au monde l'être vivant, corps et âme, et non point seulement une de ses parties. Nul ne dirait par exemple qu'Elisabeth est la mère de la chair (sarkotokos), qu'elle n'est pas la mère de l'âme (psychotokos) ; car elle a mis au monde Jean-Baptiste, avec son corps et son âme, cette personne unique, l'homme composé de corps et d'âme. C'est quelque chose de semblable qui se passe à la naissance de l'Emmanuel. II a été engendré, avons-nous dit, de la substance du Père, étant son Verbe, son Fils unique ; mais quand il a pris chair, et qu'il s'est fait Fils de l'homme, il est nécessaire de confesser, qu'il est né de la femme selon la chair [...] »[2].
4. Blasphème de ceux qui cherchent à semer dans le cœur des enfants l’indifférence, le mépris, ou même la haine de cette Mère Immaculée.
5. Offenses de ceux qui l’outragent directement dans ses saintes Images.
Rappelons finalement les conditions demandées par la Sainte Vierge pour cette dévotion (pour chaque samedi) :
1. Confession dans les huit jours.
2. Communion réparatrice.
3. Chapelet.
4. Méditation de 15 minutes sur les mystères du Rosaire.
Apendice: Sur la Virginité de Marie contre Sœur Lucie Caram
Le Sub tuum præsidium constitue probablement la plus ancienne prière chrétienne adressée à la Vierge Marie. Cette prière était employée depuis longtemps dans les rites d’Orient et d’Occident, selon de nombreuses variantes textuelles, lorsque, en 1917, la John Rylands Library de Manchester fit l’acquisition d’un lot de papyrus en provenance d’Egypte (sans précision exacte de la localisation où ils furent découverts), parmi lesquels un fragment de 18 cm par 9,4 cm contenait son texte en grec.
C. H. Roberts en fit la publication en 1938 (Catalogue of the Greek and Latin Papyri in the John Rylands Library, III, Theological and literacy Texts, Manchester 1938, pp. 46-47). Mais son collègue E. Lobel, avec lequel il collabora à l’édition des papyrus d’Oxyrhynque, se fondant sur une analyse purement paléographe, déclara que le texte ne peut absolument pas être plus tardif que le IIIème siècle, la datation probable se situant entre 250 et 280. Le Sub tuum præsidium précède donc de plusieurs siècles l’Ave Maria dans la prière des chrétiens.
Sur le papyrus Rylands, on peut déchiffrer : | Ce qui correspond au texte grec : |
Une version latine littérale du texte grec pourrait être : Sub tuam | Et une traduction française pourrait être : Sous ta |
Il s’agit donc d’une prière de grande valeur historique. Le recours à la Vierge Marie de la communauté chrétienne en danger situe sans doute l’invocation dans un contexte de persécution (celle de Valérien ou celle de Dèce). Ainsi le premier point remarquable consiste en ce que la communauté chrétienne égyptienne se tourne directement vers Marie et demande sa protection. Les chrétiens ont conscience du fait que la Vierge est proche de leur souffrance et lui demande explicitement son secours, reconnaissant par là-même la puissance de son intercession.
Mais ce qui est le plus étonnant ce sont les trois vérités théologiques fondamentales admirablement y synthétisées :
1. L’élection spéciale de Marie par Dieu (« seule bénie »).
2. La Virginité perpétuelle de Marie (« seule pure »).
3. La Maternité divine (« Mère de Dieu » ou mieux encore « Génitrice de Dieu »).
Outre le texte grec, il existe des anciennes versions coptes, syriaques, arméniennes et latines. Je voudrais remarquer que dans le texte romain que nous connaissons, l’adjectif «gloriosa» s’est substitué à « casta » : il s’agit d’une interpolation tardive, absente du plus ancien témoin du texte (l’Antiphonaire de Compiègne) et de sa version Dominicaine, qui ne disent que Virgo benedicta. La phrase musicale a également influé sur le texte romain, attribuant à tort le « semper » à « libera nos », alors qu’il devrait manifestement s’attribuer selon l'original à « Virgo » : on devrait donc lire «libera nos, semper Virgo » (toujours Vierge), au lieu de « libera nos semper, Virgo ». Le musicologue Amédée Gastoué (1873 † 1943) pensait qu’on avait tenté d’adapter la traduction latine à une mélodie orientale vaille que vaille, ce qui expliquerait le changement d’attribution du «semper» pour tenir dans une phrase musicale préexistante.
Semper Virgo… toujours Vierge. Maintenant je me pose une question : si les chrétiens de 3ème siècle, secoués par les terribles persécutions, avait cette grande conscience, mais surtout un grand respect de la Virginité de Marie, qui es-tu Sœur Lucia Caram pour dire que notre sainte Mère n’était pas Vierge ? Avec quel fondement parles-tu ? Mais quelle folie que celle-ci ! Même pas les fondateurs du protestantisme n’ont jamais osé faire une telle déclaration. Ulrich ZWINGLI, pour ne citer qu’un, avait dit :
«Je n’ai jamais pensé, encore moins enseigné, ou déclaré publiquement, quoi que ce soit au sujet de la toujours vierge Marie, Mère de notre sauveur, qui puisse être considéré comme déshonorant, impie, indigne ou mauvais. […] Je crois avec tout mon cœur, en accord avec la parole du saint Évangile que cette vierge pure porta pour nous le Fils de Dieu et qu’elle resta, dans l’enfantement et après celui-ci, une pure et sans tâche vierge, pour l’éternité. » (Sermon Marie, toujours vierge, mère de Dieu, 1524).
Ma sœur… c’est une vérité de foi que Marie est Mère du Seigneur et toujours vierge…avant, durant et après la naissance du Christ. En fait, Il est venu d’un sein laissé parfaitement intact… mais oui, je le sais, les hérétiques existerons toujours…Dieu nous en épargne ! Vous chers lecteurs, ne soyez pas inquiets, bien au contraire « Réjouissons-nous, disait saint ugustin ; que les peuples tressaillent de bonheur et d’allégresse. Ce n’est pas ce soleil visible, mais son invisible Créateur qui a fait pour nous de ce jour un jour sacré; quand devenu visible pour l’amour de nous, l’invisible Créateur de sa mère est né de son sein fécond sans aucune atteinte à sa pureté virginale; car elle est restée Vierge en concevant son Fils, Vierge en l’enfantant, Vierge en le portant, Vierge en le nourrissant de son sein, Vierge toujours. Pourquoi t’étonner de ceci, ô mortel? (Sermon 186, 1).
P. Silvio Moreno, IVE
[1] Cf. Lucie, Mémoires, Fatima, 1963 ; id., Lucie raconte Fatima, éd. par dom C. Jean-Nesmy, Paris et Montsûrs, 1975 ; id., Memorias II, Fatima, 1996
[2] Lettre de St Cyrille d'Alexandrie aux moines d'Egypte, avant le Concile, pour les mettre en garde contre Nestorius Epist. I, P.G., 77. (Traduction E. Amann, "Le dogme catholique dans les Pères de l'Eglise", Beauchesne, 1922).