C’est une question que l’on pose souvent. Malgré les nombreux points communs entre catholicisme et protestantisme, et malgré le rapprochement doctrinal obtenu par le dialogue œcuménique, il existe de nombreuses différences entre le culte protestant et le culte catholique que nous ne pouvons ignorer. Il faut être realiste et reconnaître la vérité: cela fait la différence.
1. Les protestants se référent uniquement à la Bible comme source de doctrine. Nous l’avons déjà expliqué. Ils récusent en particulier la tradition et le Magistère de l’Eglise. Ils insistent sur le rôle de l’Esprit Saint pour accéder à une compréhension véritable du message biblique, la libre interprétation.
2. Les protestants n’accordent pas à leur clergé un rôle spécifique de prêtres consacrés. Les pasteurs sont seulement des conseillers et des savants dont le rôle est de former les croyants, de leur indiquer la direction à suivre. Ils président le culte et administrent la sainte-Cène mais, moyennant une officialisation par l’Église pour des raisons de bon ordre et de discipline, des laïcs peuvent parfaitement en faire autant, y compris la prédication moyennant formation théologique. C’est l’ensemble des croyants qui est investi dans le sacerdoce universel, fondée notamment sur une interprétation partielle des textes de l’Épître aux Hébreux. Dans l’Église catholique, le prêtre en prononçant les paroles de l’absolution au sein du sacrement de la confession accorde effectivement le pardon de Dieu, le pasteur se borne à rappeler au cours de la liturgie la promesse de pardon acquise « à ceux qui se repentent et qui croient» ; le reste se passe directement entre le croyant et Dieu (exception : les anglicans utilisent le mot prêtre, sans toutefois y mettre le sens catholique).
3. Les protestants ne reconnaissent pas l’autorité du Pape, ni celle des cardinaux. Ils ont perdu le principe d’unité. Pour cela il existe une multitude de communautés protestantes non affiliées les unes aux autres et parfois contradictoires les unes aux autres. Les communautés protestantes sont organisées soit autour d’évêques parfois appelés inspecteurs ecclésiastiques, il est alors question de système épiscopalien (cas des Luthériens et des Anglicans), soit autour de conseils presbytéraux souverains, les paroisses adhérant volontairement à des unions d’Églises régies par une sorte d’assemblée générale dénommée synode, il est alors question de système presbytérien-synodal (cas des Églises réformées). Ces unions se regroupent par obédience (luthérienne, réformée, anglicane, baptiste, méthodiste, etc.) au sein de fédérations internationales qui sont en général elles-mêmes affiliées au Conseil œcuménique des Églises (COE).
4. En général les protestants, refusent les sacrements institués par Jésus-Christ, par contre, ils ont le baptême (qui n’est pas toujours valide) et la célébration de la Cène (qui n’est pas présence réelle et substantielle de Jésus-Christ). Les protestants n’ont donc pas de sacrement de réconciliation et le pasteur n'a pas le pouvoir de remettre les péchés. L’ordination (des pasteurs luthériens) ou la reconnaissance des ministères (des pasteurs réformés) remplacent l’ordination des prêtres mais en sont très éloignées dans la forme comme dans le fondement théologique, la question de la prêtrise restant au fond la grande différence entre les catholiques et protestantes. Le mariage protestant peut être rompu et les communautés protestantes acceptent en général de célébrer des remariages en situation d’adultère.
5. Le purgatoire (lieu de souffrance auquel l’homme accède après la mort pour se racheter et se purifier de ses péchés avant d’accéder au paradis), la canonisation (pratique catholique, mais aussi orthodoxe, par laquelle un homme ou une femme est reconnu comme Saint ou Sainte) et l’indulgence n’existent plus.
6. L’excommunication (pratique par laquelle le Pape interdit quelqu’un de recevoir des sacrements) existe en principe également chez les protestants. Elle serait prononcée soit par l’évêque (organisation de la communauté selon le système épiscopalien), soit par le conseil presbytéral (système presbytéro-synodal).
7. Les protestants ne font pas appel à des intercesseurs comme Marie ou les Saints dans leurs prières. Selon eux le croyant est seul responsable devant Dieu et ne doit pas passer par des intermédiaires pour dialoguer avec Lui. Ils croient que Jésus est le seul intermédiaire entre Dieu le Père et eux-mêmes.
10. Les pasteurs protestants ont le droit de se marier et les femmes exercent couramment le service pastoral.
11. Le protestants ne pratiquent pas le signe de croix et n’utilisent pas d’eau bénite, car ils considèrent qu’il s’agit là de superstitions. Il n’y a pas non plus de cérémonie pour les morts de type messe anniversaire.
Blessure aux trois blancheurs de l'Eglise catholique:
Revenons encore sur un point très important de nos différences qui ne peut pas être négligé: les trois blancheurs. Malheureusement les protestants ont blessé l’Eglise de Jésus-Christ avec un triple refus : « un triple refus caractérise le désaccord entre les protestants et Rome. Ce triple refus peut être exprimé dans une formule lapidaire : un homme, une femme, une chose ; à savoir : le pape, Marie, la messe »[2].
Refus du pape[3] : dans ce refus, c’est toute l’Eglise catholique que les protestants refusent, avec sa visibilité, sa hiérarchie ; son chef unique (puisque l’Eglise est monarchique), le pape, successeur de saint Pierre, représentant de Notre Seigneur. C’est une grave erreur. En effet, la Bible contient la preuve irréfutable que Jésus a fait de saint Pierre le premier pape. Entre autres choses : le changement du nom de Pierre ; les clés du royaume ; la ressemblance frappante entre Matthieu 16 et Isaias 22 ; qui est le Rocher de Matthieu 16 ? C’est Pierre, la foi indéfectible de Pierre ; Jésus confie l’ensemble de ses brebis à Pierre ; l’importance du nom de Pierre dans l’Écriture ; Pierre prend le rôle de premier plan dans le remplacement de Judas, la primauté de Pierre dans les Actes des Apôtres, et plus encore. En outre, l’Église primitive a reconnu l’évêque de Rome comme le successeur de l’autorité de saint Pierre.
Scott Han disait : « Où est Pierre est l'Église » a écrit saint Ambroise au quatrième siècle. L’Église visible que Kerry et moi avions refusée de voir était là, présente, depuis toujours. Malgré les persécutions, les scandales et les péchés de ses membres, l’Église catholique est vivante. Elle se tient debout invincible depuis deux mille ans et durera jusqu’à la fin des temps, parce que le Christ Lui-même l’a promis : «Eh bien ! moi je te dis : Tu es Pierre, » a dit le Seigneur «et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les Portes de l’Hadès ne tiendront pas contre elle» (Mat 16,18).
Refus de Marie : ce que les protestants refusent, ce n’est pas la maternité de Marie, ni même sa virginité, car « la majorité des protestants souscrivent à l’idée biblique de la virginité mariale»[4]. Le refus est celui du culte marial, comme tout le culte des saints d’ailleurs. Les catholiques, selon les protestants, déifient Marie et la transforment en déesse. Une idolâtrie. Cette accusation rejoint leur refus d’admettre d’autres médiateurs que le Christ. Certes, Notre Seigneur est l’unique Médiateur entre Dieu et les hommes, mais cela n’implique pas l’absence d’autres médiateurs, agissant sous la dépendance et par la grâce de Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est d’ailleurs ce qui se passa aux Noces de Cana : Notre Seigneur intervint à la prière de sa sainte Mère. Il est intéressant dans ce sens d’écouter le témoignage de Scott Han, grand intellectuel protestant et convertit à l’Eglise catholique[5] :
« … je commençais à prier avec un rosaire. J’avais très peur de faire cela. Je demandais au Seigneur de ne pas être offensé alors que je m’essayais. Je commençais à prier et tandis que je priais, je ressentais davantage dans mon cœur ce que je savais dans mon esprit : je suis un enfant de Dieu. Je n’ai pas simplement Dieu comme Père et Christ comme frère, j’ai aussi Sa Mère. Un de mes amis qui avait entendu dire que je songeais à devenir catholique, me téléphona un jour et me dit : « est-ce que tu adores Marie comme le font les catholiques ? » Je lui répondis : « Ils n’adorent pas Marie, ils honorent Marie». « Et bien, quelle est la différence ? ». Je dis : « laisse-moi t’expliquer. Quand le Christ a accepté l’appel de son Père à s’incarner, Il a accepté la responsabilité d’obéir à la loi, la loi morale qui est résumée dans les 10 commandements. Il y a un commandement qui dit ceci : « tu honoreras ton père et ta mère ». En hébreu, ce mot « honorer » (kaboda), signifie : « glorifier », conférer à ton père et ta mère la gloire et l’honneur que tu as pour eux. Le Christ a accompli cette loi plus parfaitement qu’aucun humain en conférant Sa gloire à son Père des Cieux et en prenant de Sa propre gloire divine pour honorer sa mère. Tout ce que nous faisons avec le rosaire, c’est d’imiter le Christ qui a honoré Sa Mère avec sa propre gloire. Nous l’honorons avec la gloire du Christ ».
Refus de la Messe : le débat ne porte pas seulement ou essentiellement sur « la présence réelle de Christ dans le sacrement de la Cène, qui, il est vrai, est fort débattue, y compris à l’intérieur du protestantisme » (G. Monet, ib.). C’est surtout sur la notion de Sacrifice et de sacrifice propitiatoire que les protestants butent. Pour eux, il n’y a qu’un sacrifice, celui de Jésus sur la Croix, qui ne peut être renouvelé. Il y a chez eux une triple erreur sur la Messe :
1. Négation du caractère sacrificiel de la Messe, qui ne serait qu’un simple mémorial de la Passion pour instruire les fidèles et leur rappeler le sacrifice du Calvaire, afin de provoquer un acte de Foi (si Luther parle de sacrifice, c’est uniquement dans le sens de sacrifice de louanges et d’action de grâces) ;
2. Négation de la Transsubstantiation (conversion instantanée de toute la substance du pain et du vin en celle du Corps et du Sang du Christ, de telle sorte qu’il ne demeure rien de la substance précédente et uniquement les accidents) ;
3. Négation du sacerdoce particulier du prêtre, qui ne serait qu’un président d’assemblée qui n’agit plus « in persona Christi » (en la personne de Jésus-Christ).
Scott Han nous explique encore : « La deuxième chose qui se produisit fût lorsque je descendis discrètement à la chapelle du sous-sol de l’Université Marquette. Il y avait la messe de midi et je n’étais jamais allé à une messe auparavant. Je me suis assis dans le dernier banc. Je ne me suis pas agenouillé. Je ne me suis pas incliné. Je ne me suis pas levé. J’étais un observateur, j’étais là pour regarder. Mais je fus surpris lorsque je vis 40, 50, 60, 80 ou 100 personnes ordinaires, qui venaient de l’extérieur pour la messe de midi, des gens ordinaires qui entraient, s’inclinaient, s’agenouillaient et priaient. Ensuite une cloche sonna, ils se levèrent tous et la messe commença. Je n’avais jamais vu cela avant [...] Puis la liturgie de l’Eucharistie commença. Je regardais et faisais silence lorsque le prêtre prononça les mots de la consécration et éleva l’hostie. Et je dois avouer que les dernières traces de doute disparurent au même moment. Je regardais et dis : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Lorsque les gens commencèrent à s’avancer pour recevoir la communion, je bavais littéralement : « Seigneur, je veux te recevoir, je veux être plus pleinement en communion avec toi. Tu es venu dans mon cœur. Tu es mon Sauveur et mon Seigneur personnel, mais maintenant je crois que Tu veux venir sur ma langue, dans mon estomac et dans mon corps aussi bien que dans mon âme jusqu’à ce que cette communion soit totale ». Dès que cela commença, ce fût terminé. Les gens restaient quelques minutes pour rendre grâce puis ils quittèrent. Et finalement, je sortis en me questionnant intérieurement sur ce que je venais de faire. Mais le jour suivant j’étais là de nouveau, et le suivant aussi, et ainsi de suite. Je ne pouvais le dire à personne, je ne pouvais pas le dire à ma femme. Mais après 2 ou 3 semaines j’étais accro. J’étais… en amour avec le Christ et sa Présence Réelle dans le Saint Sacrement. C’était devenu la source et le sommet, le temps fort de chaque jour, et je ne pouvais toujours pas en parler à quiconque ».
Prions prions, prions pour que nous puissions retrouver l'unité dans l'Eglise catholique avec le Pape, le culte de la Vierge Marie et le saint sacrifice de la Messe!!!
P. Silvio Moreno, IVE
[1] Groupe des Dombes, Marie dans le dessein de Dieu et la communion des saints. Dans l’histoire et l’Écriture. Controverse et conversion, 1998 et 1999, réunis en seul volume, Paris, Bayard-Centurion, 1999
[2] Cf. L. Gagnebin, Qu’est-ce que le protestantisme ? Trois définitions possibles » in : L. Gagnebin et A. Gounelle, Le protestantisme ? Ce qu’il est. Ce qu’il n’est pas. Carrières-sous-Poissy, La Cause, 1990, p. 9.
[3] Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, La primauté
du successeur de Pierre dans le mystère de l’Eglise, http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_doc_19981031_primato-successore-pietro_fr.html ; Benoît XVI, audience générale, mercredi 7 juin 2006
[4] Cf. G. Monet, Modernités et protestantismes, Université Marc Bloch, faculté de théologie protestante de Strasbourg, 2006.
[5] Pour lire l’histoire entière de Scott et Kimberley Hahn, leur livre est disponible dans plusieurs pays. En France : Titre « Rome Sweet Home» de la foi de Luther à la foi de Pierre» aux Editions de l’Emmanuel.