PARDONNER POUR SE LIBERER

PARDONNER POUR SE LIBERER

ÉVANGILE DE SAINT LUC 6,27-37

Quel est votre avis ? Si un homme possède cent brebis et que l’une d’entre elles s’égare, ne va-t-il pas laisser les quatre-vingt-dix-neuf autres dans la montagne pour partir à la recherche de la brebis égarée ? Et, s’il arrive à la retrouver, amen, je vous le dis : il se réjouit pour elle plus que pour les quatre-vingt-dix-neuf qui ne se sont pas égarées. Ainsi, votre Père qui est aux cieux ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu. […] Alors Pierre s’approcha de Jésus pour lui demander : « Seigneur, lorsque mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? » Jésus lui répondit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois.

À L’ECOUTE DE L’ÉGLISE (PAPE FRANÇOIS)

« Jésus donne aux apôtres le pouvoir de pardonner les péchés. Il est un peu difficile de comprendre comment un homme peut pardonner les péchés, mais Jésus donne ce pouvoir. […] À travers le ministère apostolique, je suis touché par la miséricorde de Dieu, mes fautes me sont pardonnées, et la joie m’est donnée. De cette façon, Jésus nous appelle à vivre la réconciliation également dans la dimension ecclésiale, communautaire. Et cela est très beau. […] Certes, Dieu pardonne chaque pécheur repenti, personnellement, mais le chrétien est lié au Christ, et le Christ est uni à l’Église. Pour nous chrétiens, c’est un don en plus, et il y a également un engagement supplémentaire : passer humblement à travers le ministère ecclésial. Nous devons valoriser cela; c’est un don, un soin, une protection et c’est également la certitude que Dieu m’a pardonné. Je vais voir mon frère prêtre et je dis : « Père, j’ai fait cela... ». Et lui répond : « Mais moi je te pardonne ; Dieu te pardonne ». À ce moment, je suis sûr que Dieu m’a pardonné ! Et cela est beau, cela signifie avoir la certitude que Dieu nous pardonne toujours, ne se lasse pas de pardonner. Et nous ne devons pas nous lasser d’aller demander pardon ». 

Prière pour pardonner

En ton Nom, Seigneur Jésus, je Te demande la grâce de venir m'aider à pardonner. De moi-même, je ne puis pardonner vraiment comme Tu nous le demandes. C'est pourquoi j'implore l'aide de ton Amour et la puissance de ton Sang qui nous donne accès à ta Miséricorde.  JE PARDONNE A TOUTES LES PERSONNES QUI M'ONT BLESSÉ(E) DE QUELQUE FAÇON QUE CE SOIT, CONSCIEMMENT OU INCONSCIEMMENT. Je Te prie Seigneur Jésus, de le (la) bénir et de le (la) combler de ta grâce dès aujourd'hui et pour toujours. Seigneur Jésus, Toi qui es Miséricorde, je mets ma confiance en Toi. Je Te le demande par les mérites de tes Saintes Plaies et de ta Croix glorieuse. Je te rends grâce de tout ce que ton Amour m'accorde aujourd'hui, de tout ce que Tu feras encore demain en moi, et de ce que Tu feras dans cette personne à laquelle je pardonne. AMEN.

CONCRÈTEMENT

« Le pardon des offenses devient l’expression la plus manifeste de l’amour miséricordieux, souligne le pape, et pour nous chrétiens, c’est un impératif auquel nous ne pouvons pas nous soustraire », affirme encore le pape. Cependant, « le pardon est rare » et « bien souvent, il nous semble difficile de pardonner ! » constate le pape. Il demande à ne pas oublier que « le pardon est le moyen déposé dans nos mains fragiles pour atteindre la paix du cœur : se défaire de la rancœur, de la colère, de la violence et de la vengeance, est la condition nécessaire pour vivre heureux».

Pape François

Réflexion pour la méditation

 C’est difficile de pardonner. « Ce n’est pas moi qui suis fautif. On m’a gravement nui, il faut qu’il y ait la réparation». Nous sommes d’une dureté inimaginable envers ceux qui nous ont fait du mal. Imaginons ce que serait la dureté d’un Dieu vengeur envers nous et nos infidélités quotidiennes ! La faculté de pardonner, c’est la plus belle et la plus grande chose que Dieu nous ait donné. C’est une libération incroyable. Et si… je pardonnais de bon cœur aux personnes qui m’ont fait du mal… Et si je demandais pardon à mon tour à celles que j’ai blessées ? Je pourrais… prier pour tous ceux qui ne sont pas mes amis, mes proches, leur souhaitant tout le bien possible.

En effet, entre les exigences du « notre Père », l’une de plus difficiles est celle du pardon. Nous voulons que les autres, à commencer par Dieu même, nous comprenne, nous pardonne, soient patients envers nous, en nous offrant toujours une nouvelle opportunité. Mais rarement sommes-nous là pour leur offrir le pardon, la patience, une nouvelle opportunité, etc. Nous pouvons dire que rien d’autre ne mettra en évidence l’équilibre et la maturité d’une personne, si elle n’a pas la disposition et la capacité à pardonner. Jésus était bien conscient de cela et c’est pour cela qu’après la prière du notre Père, il reprendra, dans un ton de réprimande, une seule phrase, celle du pardon. Pourquoi ? Parce que c’est l’unique phrase enseignée par Jésus qui nous fait mal. C’est l’unique phrase où le Seigneur exige de nous de faire quelque chose. Nous demandons le pain quotidien, de nous libérer du mal, de ne pas tomber dans la tentation… etc., tout cela à condition de savoir pardonner. Combien coûte tout cela !!!

La miséricorde et le pardon des ennemis ont une énorme capacité de maturation. C’est-à-dire manifestent la maturité d’une personne, et la produise. Dans la mesure où une personne pardonne, elle mûrit, grandit et se perfectionne psychologiquement et spirituellement. Dans la mesure où elle garde rancune, haine, sa vie spirituelle et psychologique recule incroyablement.

L’assassin de Sainte Marie Goretti, Alessandro Serenelli fut condamné à 30 ans de prison : il évita la perpétuité parce que, selon la législation de l’époque, il n’était alors pas encore majeur. Après trois terribles ans de prison, une nuit il eut un rêve qui changea sa vie dans la prison. Voici son propre témoignage :

« Je me voyais dans un jardin plein de lys blancs. Je vis apparaitre Marieta, belle et vêtue de blanc, qui commença à cueillir des lis et à les déposer dans mes bras, souriant comme un ange, jusqu’à ce que mes bras fussent chargés. Bientôt, cependant, je me rendis compte que les lis que je tenais se transformaient en torches. Marieta me sourit de nouveau et disparut. Je me réveillai en sursaut, et je me dis : maintenant je suis sauvé parce que j’ai la certitude que Marieta est venue me voir et m’a accordé son pardon. À partir de ce jour, je ne sentis plus l’horreur d’auparavant dans ma vie».

Il sortit de prison en 1929, après un enfermement de 27 ans. Huit ans après avoir retrouvé la liberté, il décida d’entrer dans l’Ordre des Frères mineurs capucins et fut accueilli au monastère d’Ascoli Piceno, dans la commune de Macerata, et il commença à effectuer entre autres des travaux de jardinage. Alessandro n’était pas exactement un moine, mais il vécut parmi eux jusqu’à la fin de sa vie. Le choix de passer le reste de sa vie dans un couvent lui fut dicté par le désir d’achever de se racheter par la repentance.

Il y mourut le 6 mai 1970, à l'âge de 88 ans, en laissant le testament suivant:

« Je suis âgé de presque 80 ans, et ma journée va bientôt se terminer. Si je jette un regard sur mon passé, je reconnais que dans ma première jeunesse j’ai pris un mauvais chemin : celui du mal qui m’a conduit à la ruine ; j’ai été influencé par la presse, les spectacles et les mauvais exemples que la plupart des jeunes suivent sans réfléchir, mais je ne m’en souciais pas. J’avais auprès de moi des personnes croyantes et pratiquantes, mais je ne faisais pas attention à elles, aveuglé par une force brutale qui me poussait sur une route mauvaise. À vingt ans j’ai commis un crime passionnel, dont le seul souvenir me fait encore frémir aujourd’hui. Marie Goretti, qui est aujourd'hui une sainte, a été le bon ange que la Providence avait mis devant mes pas. Dans mon cœur j’ai encore l’impression de ses paroles de reproche et de pardon. Elle a prié pour moi, intercédé pour moi, son assassin. Trente ans de prison ont suivi. Si je n’avais pas été mineur, j’aurais été condamné à vie. J’ai accepté la sentence méritée ; j’ai expié ma faute avec résignation. Marie a été vraiment ma lumière, ma Protectrice ; avec son aide j’ai acquis un bon comportement et j’ai cherché à vivre de façon honnête lorsque la société m’a accepté à nouveau parmi ses membres. Avec une charité séraphique, les fils de saint François, les frères mineurs capucins des Marches, m’ont accueilli parmi eux non comme un serviteur, mais comme un frère. C’est avec eux que je vis depuis 1936. Et maintenant j’attends avec sérénité le moment où je serai admis à la vision de Dieu, où j’embrasserai de nouveau ceux qui me sont chers, où je serai près de mon ange gardien et de sa chère maman, Assunta. Puissent ceux qui liront ma lettre en tirer l’heureuse leçon de fuir dès l’enfance le mal et de suivre le bien. Qu’ils pensent que la religion avec ses préceptes n’est pas une chose dont on puisse se passer, mais qu’elle est le vrai réconfort, la seule voie sûre dans toutes les circonstances, même les plus douloureuses de la vie. Paix et bien !»[1].

Alessandro demanda aussi publiquement pardon à Assunta, la mère de Marieta, en se mettant à genoux devant elle, le 25 décembre 1934: «Pardonnez-moi Assunta ». Et elle répondit : « Si elle (Marietta) t’a pardonné, si Dieu t’a pardonné, alors je te pardonne moi aussi»[2].

En effet, Marie aussi l’avait pardonné. Après une route longue et très pénible en ambulance, on arrive à l'hôpital. Les médecins s'étonnent que Marie n’ait point succombé à ses blessures: le péricarde, le cœur, le poumon gauche, le diaphragme, l’intestin ont été atteints par le couteau. Le voyant perdue, ils appellent l’aumônier. Maria se confesse en toute lucidité et au moment de lui donner la Sainte Communion, le prêtre l’interroge: «Maria, pardonnez-vous de tout coeur à votre assassin?» Elle réprime une répulsion instinctive, puis répond: «Oui, je lui pardonne pour l’amour de Jésus... et je veux qu’il vienne lui aussi avec moi en Paradis... Je le veux à côté de moi... Que Dieu lui pardonne, parce que moi je lui ai déjà pardonné...».

Voici le pardon des hommes et de Dieu.

P. Silvio Moreno, IVE

 

[1] Alessandro Serenelli, testament autographe, 5 mai 1961.

[2] Giordano Bruno Guerri, Pobre Santa, Pobre Asesino: La Verdadera Historia de Maria Goretti, Seix Barral, 1986, p. 251.

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