1) OBJECTION ?
Nous parlerons aujourd’hui[1] de la problématique des images saintes chez les catholiques. Pourquoi les chretiens fonts-ils des images ? Sont-ils vraiment des idolâtres ? Respectent-ils la Parole de Dieu par rapport à ce point-là ? En effet, IL EST ÉCRIT, dans le livre de l'Exode: «Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre». (Exode 20.4 et Lévitique 26.1) Cette citation biblique peut faire comprendre que tous les catholiques sont vraiment des idolâtres.
2) CEPENDANT:
1. Ne tirons pas ce texte de son contexte. Dieu réprouve ici le culte idolâtrique rendu à d'autres dieux et aux idoles païennes, ainsi que l'indique le verset précédent: « Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face. » (Ex 20.3). Ce culte s'exerçait traditionnellement sur des statues ou idoles. D'où encore la suite du verset cité: « ...tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point. » (Ex 20.5; Lév 26.1). Alors ce que Dieu interdit, ce ne sont pas toutes les statues, les images ou les objets, mais celles qui font l'objet d'un culte idolâtrique. Dieu condamne le culte idolâtrique, qui consiste à adorer, vénérer ou invoquer un objet ou une créature comme sacré et doué d'un quelconque pouvoir (voir Isaïe 44.17). Ainsi en était-il des idoles égyptiennes et du veau d'or (Ex 32). Et ainsi en est-il des amulettes et de tout objet considéré comme magique ou puissant en soi-même.
2. Dieu n’interdit pas toutes les statues, les images, etc. La preuve: dans la même Bible, il prescrit certaines représentations ou statues. Ainsi les deux chérubins (= anges) en or sur l'arche d'alliance (Ex 25.18-20) ou le serpent d'airain au désert (Nombres 21: Les Israélites devaient même regarder celui-ci - et non l'adorer! -pour être sauvés de la morsure des serpents; cette effigie de serpent était la préfiguration du Christ crucifié qui sauve du péché: cf. Jn 3.14.) Ces statues sont prescrites par Dieu, et elles ne sont évidemment pas des idoles à adorer. Elles sont prescrites comme des SIGNES de la présence protectrice et salvatrice de Dieu, destinés à éveiller la foi et la confiance des Israélites. Il s’agit donc des signes. Ainsi dans les Actes des Apôtres: « Dieu faisait des miracles extraordinaires par les mains de Paul, au point qu'on appliquait sur les malades des linges ou des mouchoirs qui avaient touché son corps, et les maladies les quittaient, et les esprits malins sortaient». (Ac 19.11-12) Regardant ce texte nous comprenons bien alors le pourquoi de l’importance des reliques des saints.
3. Dans l'Église catholique, il en va exactement comme dans la Bible: les statues ou images sont seulement des SIGNES ou symboles pour notre foi. Elles ne font l'objet d'aucune adoration et qui fait une adoration aux images tombe dans le péché de l’idolâtrie. Mais personne ne peut nous dire que la bible interdit les images. Il est ABSURDE de prétendre que les catholiques les adorent comme le feraient de vulgaires païens primitifs!
3) POUR MIEUX COMPRENDRE
Les statues religieuses sont comme la photo d'une personne qui nous est chère. Ce n'est pas la photo elle-même (du vulgaire papier!) que nous aimons et respectons, mais la PERSONNE qu'elle représente. Dans les premiers siècles du christianisme, les sculptures ou peintures chrétiennes servaient à la catéchèse en images pour un peuple illettré, de la même manière que nous avons aujourd'hui des bandes dessinées chrétiennes. Cela entre dans la logique de l'Incarnation : l'œuvre de Saint Jean de Damas, Discours sur les images[2], nous aider à comprendre cette réalité. Il écrivait en réaction à la controverse iconoclaste (les problèmes des icônes, images sacrées) qui commença au huitième siècle sous le règne de l'empereur byzantin Leon III et continua sous son successeur Constantin V. St Jean de Damas admet que la représentation du Dieu invisible est une faute mais que lors de l'incarnation où « le Verbe s'est fait chair » (Jean 1:14), le Dieu invisible est devenu visible et que, par conséquent, il est permis de représenter Jésus Christ. Il argumente: « Lorsque Lui qui est sans corps et sans forme… existant sous la forme de Dieu, S'incarne et prend la forme d'un serviteur en substance comme en stature et se retrouve dans un corps de chair, alors on peut dessiner Son image... ». Il justifie également les marques extérieures de respect envers des icônes sur la base qu'il y a « différentes formes d'adoration » et que le respect montré à une icône diffère totalement de l'adoration de Dieu. Il poursuit en citant des exemples tirés de l'Ancien Testament : « Jacob s'agenouilla jusqu'au sol devant Esaü, son frère, et aussi devant la pointe du bâton de son fils Joseph » (Genèse 33:3). « Il s'agenouilla, mais il n'adora pas. Joshua, le fils de Nun, et Daniel s'agenouillèrent en vénération devant un ange de Dieu (Joshua 5:14) mais ils ne l'adorèrent pas. Car l'adoration est une chose et ce qui est offert en marque de respect pour honorer quelque chose de grande valeur en est une autre ». Il cite St Blaise qui affirme que « le respect donné à une image est transmis à son modèle ». Saint Jean de Damas argumente alors que la vénération portée à une image du Christ, ou de la Vierge ou d’un saint ne s'y arrête pas - la substance de l'image n'est pas le sujet de la vénération - mais va au-delà de l'image à son modèle. En vénérant une image sainte, écrit le Catéchisme de l'Eglise catholique n° 477 le croyant « vénère en elle la personne qui y est dépeinte. »
L'on accepte bien les statues dans nos villes. L'on trouve normal d'exposer chez soi ou dans nos bureaux le portrait du président, ou nos photos de famille. Alors pourquoi s'offusquer des statues ou images représentant le Christ, la Vierge ou un autre saint chez les catholiques, qui font ainsi mémoire de leur Seigneur et de leur famille spirituelle ? Mais si l'on accepte les symboles civils, pourquoi rejeter les symboles religieux en les qualifiant d'idoles ? Il faut apprendre à distinguer entre symbole (acceptable) et idole (à rejeter).
4) LA VRAI DIFFICULTE CHEZ LES CATHOLIQUES.
Le vrai problème chez les catholiques n’est pas celui de se faire des images, ou des objets sacrés, mais l’usage qu’on leur donne. L’esprit magique et superstitieux trop fréquent dans la piété populaire autour des statues, des images, des chapelets, des médailles, des bagues, de l’eau bénite, de l’encens, des huiles, des bougies, des neuvaines....est certain et dangereux. Certes, ces objets ne sont pas à réprouver en eux-mêmes – dans la mesure d’un usage sobre et d’une foi fondée sur l’enseignement de Jésus et de l’Eglise. Attention chers jeunes! L’attachement excessif qu’on leur porte trop souvent n’est pas pur de tout et de toute superstition !
Le ‘culte’ aux objets de piété est trop souvent propre aux chrétiens qui demeurent dans ce qu’on appelle l’infantilisme spirituel. Comment s’en étonner, quand on n’a que ça pour appuyer sa foi ? Regardons les ventes à la sortie de nos messes: très rarement nous y trouvons une nourriture spirituelle sérieuse (littérature de bonne formation catholique), mais seulement une quantité d’objets manufacturés, que l’on s’empressera de faire bénir (à quelle fin?). Voilà l’illusoire «nourriture spirituelle» de tant de baptisés... ! Faute d'une foi adulte, beaucoup de chretiens ne progresseront jamais dans leur vie.
5) CONCLUSION
Chers jeunes, n'hésitons pas à purifier l'attachement excessif à tous les objets de piété, qui est peu évangélique. Rectifions toujours la bonne intention devants ces objets de pitié. La mentalité magique et superstitieuse nous guette toujours, même inconsciemment. Evitons de nous enfermer dans une illusion (la solution à nos problèmes ou la réussite de nos projets) et nous rendre vulnérables aux croyances païennes. Certes, nous n'avons pas à condamner les statues et autres objets de piété en soi -- mais seulement à nous garder de toute dépendance à leur égard. Faisons-le d'abord par souci d'une foi vraie et profonde, attachée aux réalités spirituelles qu’elles même représentent. Et aussi dans le souci de ne pas provoquer le scandale ou l'incompréhension autour de nous. Le chrétien doit être un témoin de la vraie foi. Efforçons-nous d'abord de tout recentrer sur le Christ, la Parole de Dieu, et l’enseignement de l’Église, afin de sensibiliser les esprits à une foi plus profonde et intelligente.
Efforçons-nous finalement de dénoncer davantage les véritables idoles, beaucoup plus subtiles et séduisantes que des statues, celles que dénonce vraiment la Parole de Dieu. A savoir: le sexe désordonné et les plaisirs égoïstes, quand nous en devenons l'esclave ("La convoitise de la chair" (1 jn 2.16). L'argent, quand il devient maître ("Mammon" Mt 6.24 : "La convoitise de la richesse"). Le pouvoir et la gloire humaine, ("La convoitise des yeux"). Et n'oublions pas les cultes aux esprits, aux ancêtres, aux astres et autres puissances occultes, avec le recours aux grigris et aux pratiques traditionnelles qui contredisent la foi chrétienne (sacrifices, blindages, etc.). L'astrologie, les pratiques divinatoires, l'occultisme, l'ésotérisme: toutes ces pratiques sont réellement idolâtriques et l’Eglise nous demande de nous en éloigner.
[1] Conférence donnée pour le Père Silvio Moreno, IVE aux jeunes étudiants africains de la Cathédrale de Tunis, le 28 février 2015. Je m’inspire pour cette conférence sur l’expérience avec les africains subsahariens et leur pitié populaire et dans un article du P. Miguel Fuentes, pourquoi les catholiques fabriquent des images, in « En donde dice la biblia que », Edition du Verbe Incarné, 2015, p. 55-60.
[2] Cf. Benoit XVI, audience générale sur Saint Jean de Damas, le mercredi 6 mai 2009. http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2009/documents/hf_ben-xvi_aud_20090506.html